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Guillaume Quenza : "Une bonne carte de cocktails, c’est une carte qui ne plait pas à tout le monde"

Dans cette interview, le bartender Guillaume Quenza revient sur son parcours, son approche de la mixologie et la création de la carte des cocktails signature d'Anaë Gin.
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Pour comprendre la carte des cocktails signature que le bartender Guillaume Quenza a signé pour Anaë Gin, il faut s’intéresser à son parcours, son bar, Fréquence, et sa philosophie de travail. Collaborer avec lui, c’est réévaluer son rapport aux cocktails et leur élaboration. C’est se questionner mais surtout s’affranchir des codes les plus étouffants de la mixologie. C’est expérimenter et chercher – comme pour Anaë – à "Cultiver l’essentiel" ou à y revenir. Et c’est redécouvrir, de la plus vibrante et aromatique des manières, toutes les facettes de notre Gin.

Qu’as-tu trouvé dans la mixologie que tu ne trouvais pas ailleurs ?

C’est un tout. C’est d’ailleurs pour ça que je ne parle jamais de mixologie mais plutôt du métier de barman. Quel métier peut se targuer de faire rencontrer des dizaines de personnes par jour ? De permettre d'autant discuter et d'interagir ? L’interaction avec le client, c’est ça le plus important. C’est l’avantage que notre métier offre par rapport à celui de cuisinier. La possibilité de créer quelque chose sur-mesure correspondant au palais du client sur le moment. C’est mettre à profit notre créativité pour faire passer un bon moment aux gens. C’est aussi avoir des retours directs sur son travail. Je n’ai jamais autant progressé qu’en écoutant mes clients !

Tes proches ont-ils été surpris de ce choix (et de l’abandon de tes études d’ingénieur) ?

C’est plutôt moi qui aie été surpris du soutien de mes parents qui, de base, me poussaient énormément vers les études. Après mon DUT Génie Civil, j’ai voyagé un peu et au lieu de retourner en cours, j’ai commencé à travailler dans la restauration. Je pense qu’ils ont vu à quel point ce métier me correspondait et me permettait de m'épanouir.

Qu’as-tu appris dans les bars pour lesquels tu as travaillé ?

Chaque bar a été une expérience différente et extrêmement importante. Au "Beaucoup", c’était la responsabilité de gérer le bar, les commandes et la carte. À "Andy Wahloo", c’était l’intensité et le rythme de travail. L’ambiance était festive mais il fallait avoir une grosse connaissance des cocktails classiques. Au "Sherry Butt" (qui reste l'expérience la plus déterminante de ma carrière), c’était la rigueur de travail, l’apprentissage de nouvelles techniques, la recherche de goûts, d’associations de produits et le développement personnel (en particulier, la confiance en soi car les barmans y sont tout le temps challengés par les clients connaisseurs ou par les autres barmans). Disons que je serais très différent aujourd’hui s’il venait à me manquer une de ces expériences.

Cocktail "Anaë & Tonic" et son brin de salicorne signé par Guillaume Quenza (Fréquence Bar, Paris) (Crédit Photo : The Good Place)

Avec ton bar "Fréquence", il y a cette idée centrale de "revenir à l’essentiel". Quelle expérience voulez-vous proposer à vos clients ?

Le but est de désacraliser le cocktail. Nous tenons un bar à cocktails, certes, mais nous tenons avant tout un lieu de vie. Un endroit où les gens viennent se détendre, écouter de la musique, connecter avec leurs amis ou bien avec nous. Il faut que leur expérience soit la plus agréable possible, que les choses soient simples. Je pense qu’il faut effacer la distance qu’on a souvent vu par le passé entre le client et le barman. Instaurer une relation de confiance, les gens font l’effort de venir à nous, il ne nous reste plus qu’à bien les accueillir et bien les servir.

On retrouve aussi cette idée "d’essentiel" dans vos verres : "lisibilité", "simplicité" et "goûts". Qu’est-ce qui caractérise vos cocktails ?

On mise sur une simplification (apparente) de la carte. On se concentre sur les saveurs, moins sur les ingrédients. Par exemple, il nous arrive très souvent d’enlever du menu les ingrédients dont on pense qu’ils n’apportent rien à la lecture. Ensuite, on se limite dans la quantité d’ingrédients dans nos cocktails. On s’est fixés un but très simple : s’il y a un ingrédient sur le menu, on doit pourvoir le sentir dans le cocktail. Ça peut paraître évident à lire comme ça, mais bien souvent ça n’est pas le cas. Pour moi, quelque chose de simple et bon sera toujours meilleur que quelque chose de compliqué et bon. Par contre, simple ne veut pas dire facile, bien au contraire. Atteindre un goût parfait en jouant sur la simplicité (deux ou trois ingrédients) peut être un exercice extrêmement difficile et demander un travail fastidieux. 

Au-delà de la saisonnalité, comment construis-tu chaque carte de cocktails ?

Ça peut paraître bizarre à dire, mais une bonne carte de cocktails, c’est une carte qui ne plait pas à tout le monde. Tout simplement parce qu’elle doit être variée : de l’amertume, de la douceur, de la puissance, de la légèreté, de l’acidité, etc. Il faut qu’il y ait des cocktails longs, courts, avec texture, sans, pétillants, plats, etc. Le but est que chaque client y trouve son compte et son cocktail favoris ! Lorsqu’une carte est déséquilibrée cela se ressent tout de suite : on vend un ou deux cocktails principalement et le reste dort dans la station. Pour nous, rien de plus frustrant !

Cocktail "Verveine" signé par Guillaume Quenza (Fréquence Bar, Paris) (Crédit Photo : The Good Place)

Quelle est la différence entre "faire une carte de cocktails pour ton bar" et "imaginer les cocktails signature d’Anaë Gin" ?

La différence, c’est que ce ne sont pas les cocktails qui doivent être différents, mais plutôt que chaque cocktail doit mettre en valeur une facette différente du gin. C’est une construction autour d’un tronc commun avec des ramifications différentes (sans vouloir faire de la philosophie de comptoir). Chaque branche amène à un goût différent en partant pourtant du même endroit.

Comment as-tu créé les cocktails signature d’Anaë Gin ? Quelles ont été tes réflexions et ta logique ?

Il fallait que chaque cocktail montre un aspect différent du gin. Anaë est très complet, très aromatique. Pour autant, selon les ingrédients, il se révèle très versatile et d’autant plus intéressant à travailler. D’un côté, c’était important pour moi de voir comment il se comportait sur des recettes "classiques" type "Grenade" (qui fait penser à un Negroni) afin de me rendre compte de son impact dans un verre. De l’autre, je voulais voir ce qu'Anaë donnait dans des recettes purement originales comme "Coco" ou "Verveine". "Verveine", avec son acidité, sa fraîcheur et son côté végétal, est un cocktail très vif, frais et rafraîchissant. "Coco", quand à lui, n'a aucune acidité. C'est un cocktail qui joue sur la douceur et la texture avec un côté onctueux et surtout une aromatique très intense. 

Quelles sont les facettes d’Anaë Gin que tu as aimé et aimes particulièrement travailler ?

En dehors de son goût si particulier, je dirais sa texture. Son côté gras me fascine, il donne à tous les cocktails une puissance aromatique et une colonne vertébrale sur laquelle construire les goûts. Ensuite, tout en étant une bombe d’arômes, Anaë n’est pas du tout entêtant, il laisse les autres ingrédients s’exprimer et permet de construire des cocktails différents les uns des autres.

Cocktail "Coco" signé par Guillaume Quenza (Fréquence Bar, Paris) (Crédit Photo : The Good Place)

Même s’il est toujours difficile de choisir parmi ses propres créations, quel est ton cocktail favori ?  

Tu l’as bien dit, c’est un exercice compliqué car chacun de ces cocktails me fait penser à un état d’esprit, à une humeur ou un moment relativement précis de consommation. Allez, je vais dire le "Coco", j’ai un faible pour les cocktails doux et faciles à boire en ce moment. Je trouve que le côté gras de la coco sert de liant et permet au gin d’être présent pendant toute la dégustation sans jamais prendre le dessus. On ressent tous les ingrédients et jamais l’alcool. C’est comme si on avait ôté l’alcool du gin pour ne garder que son parfum, ses arômes. 

Quelles recommandations / conseils as-tu pour ceux qui aimeraient s’amuser avec Anaë Gin ?

Je pense que c’est toujours bien de commencer à jouer avec des recettes classiques afin de comprendre comment le gin se comporte en cocktail. Ensuite de là, il devient facile de commencer à s’amuser avec et de partir dans des créations pures. Mon conseil néanmoins : je trouve qu’Anaë Gin se lie formidablement bien avec des ingrédients riches (type vermouths, amaros, coco, etc.) !

Découvrez les cocktails signature Anaë Gin signés par Guillaume Quenza